• film d'animation japonais (2014)

    L'île de Giovanni 

    A Japan Association of Music Enterprises 50th Anniversary Project

    Histoire originale: Shigemichi Sugita 
    Réalisation : Mizuho Nishikubo 
    Scénario : Shigemichi SugitaYoshiki Sakurai 
    Musique : Masashi Sada 
    Design des personnages : Atsuko Fukushima 
    Supervision de l'animation : Nobutake Ito 
    Responsable des couleurs : Kumiko Yusa 
    Directeur artistique principal : Santiago Montiel 
    Directeurs artistiques : Kunihiko InabaKosuke Hayashi 
    3DCG : Eiji Inomoto 
    Effets spéciaux : Hisashi Ezura , Akira Sato 
    Direction de la photographie : Yumiko Nakata 
    Montage : Junichi Uematsu 
    Direction du son : Fusanobu Fujiyama 
    Producteur exécutif : Mitsuhisa Ishikawa 
    Producteurs : Tomoyuki MiyagawaYoshiki Sakurai

    Animé par le studio Production I.G

     

    Synopsis :  1945 : après sa défaite, le peuple japonais vit dans la crainte des Forces américaines. Au nord du pays, dans la minuscule île de Shikotan, la vie d’après-guerre s’organise dans la peur de l’invasion. Ce petit lot de terre, éloigné de tout, va finalement être annexé par l’armée soviétique. Commence alors une étrange cohabitation entre les familles des soldats soviétiques et les habitants de l’île que tout oppose, mais l’espoir renaît à travers l’innocence de deux enfants, Tanya et Junpei...
     

     

     

     Vu le 12 mars 2016 (prêt Médiathèque d'Auterive) : 

    Les dessins (paysages, véritables tableaux) sont très soignés. Si certaines scènes sont très tristes (disparition d'un jeune enfant qui n'est pas sans rappeler l'extrême précarité des orphelins de guerre nippons décrite également dans le film d'animation Le tombeau des lucioles ) cette histoire est une merveille de poésie, tant par la délicatesse des personnages que par la puissance des atmosphères restituées. L'occupation soviétique de l'île de Shokotan à l'issue de la 2nde guerre mondiale est en outre un épisode peu connu en occident.

     

     

     Sources pour aller plus loin : http://anime.kaze.fr/ (extraits)

    La production du film a débuté quand le scénariste Shigemichi Sugita prit connaissance de l’exposé d’un jeune Américain qui avait étudié les îles Kouriles. Il présenta à Sugita une compilation de témoignages de gens qui avaient habité sur l’île de Shikotan durant l’occupation soviétique à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Tout avait été réuni en un seul recueil : la confusion et le malaise des habitants, le contact avec les Russes, leur vie dans le camp d’internement de Karafuto quand les habitants y furent envoyés en plein hiver, puis leur rapatriement de force vers le continent.

    Sugita chercha tout d’abord à en faire un film en prises de vues réelles. Il alla à la rencontre des natifs de Shikotan, fit des interviews détaillées et commença à écrire une histoire inspirée de ces faits réels. Cependant, il s’aperçut rapidement qu’il était impossible de filmer sur place, et qu’il serait trop coûteux de construire des décors conformes à la réalité historique. Il en arriva à la conclusion que l’histoire était trop épique pour l’adapter en un film live.

    C’est à cette époque que des projets de films d’animation furent considérés pour commémorer le 50e anniversaire de la création de la Japan Association of Music Enterprises. JAME cherchait un moyen de laisser derrière elle une oeuvre de témoignage pour les futures générations. Il fut décidé de créer une oeuvre décrivant aux enfants des événements qui ne devaient pas tomber dans l’oubli, et c’est ainsi que le format de l’animation fut choisi. De son côté, Sugita voulait transmettre aux futures générations ce qu’il avait hérité de ses parents à travers une oeuvre forte. C’est ainsi que ce projet qui avait été laissé à l’abandon pendant cinq ans ressuscita sous la forme d’un film d’animation, produit par le studio Production I.G.

    Sugita, qui n’avait aucune expérience dans les films d’animation, fit venir Yoshiki Sakurai, qui avait travaillé sur Ghost in the Shell: Stand Alone Complex, pour écrire le scénario. Le travail commença à l’automne 2011, et il visita Karafuto en novembre pour récolter des informations. Ensuite, il alla à Nemuro où il rencontra Hiroshi Tokuno, le modèle du personnage principal du film. « Tu dois y aller. Tu ne peux pas comprendre ce qui s’est passé si tu ne t’y rends pas. C’est comme ça que tu prends conscience des choses » raconte Sugita.

    L'histoire d'Hiroshi Tokuno : 

    Les troupes soviétiques débarquent
    Le 1er septembre 1945, à 7 h 30 du matin, des navires de guerre et des bateaux de transport de troupes apparaissent soudainement et sans prévenir dans la baie Shakotan de l’île de Shikotan. Près de 700 soldats russes débarquent. À l’époque, environ 300 personnes vivaient sur l’île. M. Tokuno, âgé alors de 11 ans, raconte que les habitants étaient persuadés qu’ils étaient venus pour les tuer. Ils pensaient être bientôt envahis par l’armée américaine, alors l’arrivée des troupes soviétiques accentua leurs craintes. L’armée impériale comptait 3000 hommes mais aucune discussion ne fut possible à cause du comportement autoritaire des troupes soviétiques.

    Une fois débarquées, les troupes s’emparèrent des biens des habitants. M. Tokuno vivait avec sa famille dans une zone isolée de l’île et fut donc épargné un certain temps par ces confiscations, mais au début du printemps de l’année suivante, les huit membres de sa famille emménagèrent dans un grenier sans fenêtre où ils vécurent pendant deux ans. On trouve d’ailleurs dans le film une scène où la maison de Junpei est confisquée par les troupes soviétiques, et la famille est obligée de vivre dans une écurie. Ils se nourrirent du stock de riz laissé par l’armée japonaise, des légumes qu’ils cultivèrent et de la pêche.

    Interaction avec les enfants russes
    Peu après, les familles des soldats arrivèrent par vagues. Les enfants japonais, notamment M. Tokuno et son petit frère âgé de 2 ans, commencèrent à interagir avec les enfants russes. Ils se battirent et jouèrent sur les plages de sable blanc de la baie de Shakotan. Les filles firent des colliers de pissenlits. Tanya, la fille d’un officier, « était très jolie », se souvient M. Tokuno. Elle a servi de modèle pour le personnage de Tanya. Il raconte aussi que sa mère était très belle, et qu’elle donnait à son frère et lui des bonbons et du pain blanc faits maison fourrés de beurre et de sucre.

    La vie dans le camp d’internement de Sakhaline et le retour au Japon
    À l’automne 1947, il fut décidé de rapatrier de force tous les habitants de l’île sur le continent. Ils devaient momentanément rester à Sakhaline (appelé Karafuto par les Japonais ainsi que dans le film et par la suite dans ce document), et ils furent entassés sur des bateaux début octobre. Les toilettes de fortune installées sur le pont débordaient quand la mer se déchaînait, et après dix jours serrés les uns contre les autres à supporter les mauvaises odeurs, le froid et l’air irrespirable, ils arrivèrent à Karafuto.

    M. Tokuno et les autres vivaient dans une école primaire. Trois personnes habitaient dans un espace de 3m². Il raconte que les toilettes étaient de gros trous creusés dans la cour de l’école et qu’il arrivait que certains tombent dedans et meurent. Il n’y avait ni chauffage ni bain, peu de nourriture et d’eau. Certaines personnes moururent de malnutrition. Le père de M. Tokuno, qui avait été premier lieutenant dans l’armée impériale, fut emmené comme prisonnier au nord de Karafuto pour y couper du bois.

    Au bout de soixante jours, un bateau arriva enfin et les ramena au Japon. La fille de la soeur de M. Tokuno, âgée de deux ans, mourut à bord, et sa mère cacha le corps pour éviter que les soldats ne le jettent par-dessus bord.

    De nos jours
    Depuis 2 000, on peut visiter Shikotan sans avoir à en faire la demande écrite. En 2001, M. Tokuno exauça son rêve et assista à la cérémonie de remise des diplômes de son école primaire. Le directeur de l’école de l’époque étant décédé, il fut remplacé par l’institutrice Toshi Suzuki, qui servit de modèle pour le personnage de Sawako.

    « Je vais à Shikotan deux fois par an. Je suis resté ami avec de nombreuses familles russes » s’amuse l’homme de 80 ans. Même quand les peuples sont à la merci des enjeux cruels de la guerre, ils créent des liens qui transcendent les frontières et les races. C’est cela que raconte le film L’île de Giovanni.

     

     


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