• Le pouvoir du chien

     

    Le pouvoir du chien
    Le pouvoir du chien

    titre original : The power of the dog, drame (Nouvelle-Zélande, Australie, canada, Etats-Unis, Royaume-Uni), 126 min, 2021

    réalisation : Jane Campion
    scénario : Jane Campion, adapté du roman éponyme de Thomas Savage
    musique : Jonny Greenwood

    Société de production : See-Saw films

    Avec : Benedict Cumberbatch, Jesse Plemons, Kirsten Dunst, Koi Smit-McPhee

     

    Synopsis

    Originaires du Montana, les frères Phil et George Burbank sont diamétralement opposés. Autant Phil est raffiné, brillant et cruel, autant George est flegmatique et bienveillant. À eux deux, ils sont à la tête du plus gros ranch de la vallée. Lorsque George épouse en secret Rose, une jeune veuve, Phil, ivre de colère, se met en tête d'anéantir celle-ci. Il cherche alors à atteindre Rose en se servant de son fils Peter, garçon sensible et efféminé, comme d'un pion dans sa stratégie sadique.

      

    Dans la presse et au fil des blogs...

    Avec “The Power of the Dog”, sur Netflix, Jane Campion relève le pari du western

    D’un duel viriliste dans l’Ouest américain, la grande cinéaste néo-zélandaise tire un thriller à combustion lente. Cow-boy toxique, banjo assassin, confrontation autant attendue que redoutée… Magistral !

    Montana, 1925. Vingt ans après la mort de son mentor Bronco Henry, le cow-boy qui lui a tout appris, Phil Burbank (Benedict Cumberbatch, inattendu et formidable) vit dans le regret d’un Ouest mythique – « Il y avait de vrais hommes à l’époque » – et dirige son ranch en tyran. Quand son frère, George (Jesse Plemons), ose épouser Rose (Kirsten Dunst), on ne donne pas cher de sa peau diaphane, d’autant que la modeste veuve arrive flanquée d’un adolescent efflanqué, son fils Peter, trop délicat, trop fragile, trop… féminin.

    Trompe-l’œil

    Jane Campion, qui n’avait pas réalisé de long métrage depuis Bright Star (2009), adapte un roman de Thomas Savage et, foulant une terre de western, nous roule dans la farine. Mené d’un pas tranquille mais sûr, ce récit fascinant multiplie fausses pistes et trompe-l’œil, à commencer par sa parenté avec une certaine Leçon de piano (1993). Seulement, Rose n’est pas Ada et, loin de libérer sa voix intérieure, le beau clavier qui trône au salon vire à l’instrument de torture, tandis que Phil s’applique à la sadiser au son d’un… banjo. D’où viendra la délivrance ?

    Jane Campion : “Enfant déjà, je n’en faisais qu’à ma tête”

    Il y a un plaisir fou à se laisser happer par la beauté des images : les paysages cadrés large, la maison cossue aux boiseries sinistres, le cuir des bêtes et la peau des hommes. Jane Campion orchestre ses révélations dissonantes – une baignade secrète, la dissection d’un lapin, une chevauchée périlleuse… – avec un art du suspense non dénué de malice. Plus la tension monte, plus The Power of the Dog se resserre sur le duel, prévu et redouté, qui oppose Phil à Peter (remarquable Kodi Smit-McPhee), cultivant outrageusement son homo-érotisme. Sauf que, bien davantage que la masculinité toxique, c’est la vulnérabilité des hommes, leur peur qui passionnent la réalisatrice. Et l’on ne se rend compte qu’à la toute fin, bluffé, qu’elle nous montrait la lune et que, négligeant les indices, nous regardions le doigt.

    Marie Sauvion, Télérama


     

    «Le Pouvoir du chien» de Jane Campion: le bon, la brute et l’éphèbe

    Absente des grands écrans depuis douze ans, la réalisatrice néo-zélandaise signe un bouleversant western psychologique qui interroge la masculinité

    Phil Burbank (Benedict Cumberbatch) et son frère George (Jesse Plemons).
    Phil Burbank (Benedict Cumberbatch) et son frère George (Jesse Plemons).

    Pour Michael Cimino, le Montana était le paysage du western. C’est là qu’il a tourné Les Portes du paradis. Et c’est dans cet Etat du nord-ouest que se déroule Le Pouvoir du chien. Mais Jane Campion a tourné son film aux antipodes, dans le sud de la Nouvelle-Zélande, réinventant une esthétique du western à travers des paysages immensément monochromes et infiniment crépusculaires. On est en 1925. Les frères Burbank, l’ombrageux Phil (Benedict Cumberbatch) et le rondouillard George (Jesse Plemons), gèrent un ranch opulent. Le premier chevauche avec les hommes et les bêtes; le second s’occupe plutôt de la comptabilité. Ils partagent la même chambre d’enfant.


    Phil est un rustre qui ôte rarement ses bottes et méprise le savon. Lorsque avec sa bande de vachers il va manger au Red Mill, il raille grossièrement Peter (Kodi Smit-McPhee), l’adolescent efféminé qui a décoré les tables avec des fleurs de papier. Cette méchanceté fait pleurer Rose (Kirsten Dunst), la mère du jeune homme. George la réconforte. Il l’épouse. Rose et Peter viennent vivre à la ferme, ce qui exacerbe la méchanceté de Phil.

    Masculinité offensive
    Le dernier long métrage de Jane Campion, Bright Star, consacré au poète John Keats, date de 2009. Après s’être consacrée à la télévision avec le formidable Top of the Lake (deux saisons), la réalisatrice de l’inoubliable Leçon de piano revient sur les grands écrans par un chemin inattendu. Elle qui n’a cessé de sonder la psyché féminine observe les interactions d’un trio d’hommes et les répercussions qu'elles entraînent.

    Boucané par une rude vie en plein air, Phil le monolithique ne laisse entrevoir d’émotions que lorsqu’il évoque son mentor, le mythique Bronco Henry. Sinon, il ne perd aucune occasion d’humilier Rose et Peter. Il dépasse les bornes en forçant sa belle-sœur à jouer du piano devant le gouverneur. Rose craque, tend la main vers un verre et sombre.

    Parfois Phil va se baigner dans une boucle de la rivière. Il dissimule dans cette tanière un trésor, des revues de charme dans lesquelles des haltérophiles à moustache prennent la pose en petite tenue. Peter tombe sur ces photos. La masculinité offensive de Phil s’atténue. Il cesse d'insulter l’adolescent, il le prend sous son aile, il lui apprend à tresser le cuir.

    Lire aussi: «Top of the Lake», tant de mystères autour du lac

    Nappes atmosphériques
    Rares sont les westerns où passent des voitures automobiles (La Horde sauvage), plus rares encore ceux qui évoquent l’homosexualité (Brokeback Mountain) ou négligent de tirer des coups de feu. Le Pouvoir du chien est de ceux-là. Avec une délicatesse inouïe, la Campion suggère le lourd secret que Phil cèle dans un contexte de virilité tapageuse. Elle évoque par touches le naufrage de Rose et la souffrance du taiseux George, bouleversant quand, une larme au bord des cils, il dit à sa femme combien il est doux de «ne pas être seul». Quant au fragile Paul, il s’aguerrit et laisse entrevoir des zones d’ombre – le doux lapin finit disséqué… Il trouble Phil en lui posant une question ayant trait à la nudité de Bronco Henry. Peut-être hâte-t-il la chute du mâle dominant…

    Jane Campion a de l’empathie pour tous ses personnages, lâchés trop seuls dans un paysage trop vaste. Phil et Peter sont les seuls élus à remarquer la silhouette d’un chien dans le relief de la montagne. Quant aux autres, s’ils ne voient rien, c’est qu’il n’y a rien. Les nappes atmosphériques de Jonny Greenwood, le guitariste de Radiohead, exaltent cette faculté d’émerveillement fondant la mystique des vachers. L’histoire se conclut sur une citation biblique tirée du Psaume 22: «Protège mon âme contre le glaive, ma vie contre le pouvoir des chiens!»

    Antoine Duplan (Le temps)

     Film magnifique : "western" revisité par Jane Campion, situé dans le Montana en 1925,  personnages taiseux et complexes, plans larges sur les plaines, réflexion sur la masculinité, ellipses et ultime référence biblique : Psaume Jacques 22:20 "« Protège mon âme contre le glaive, ma vie contre le pouvoir des chiens! » (Psaume 22 :20)" (qui pourrait signifier « délivre mon âme du péché et de la culpabilité»)

    Vu en juin 2023 (Netflix)

     

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