• Roman

    Western / Jean Van Hamme (scénario), Gzregorz Rosinski (dessin)

    Western

    roman graphique.- Editions Le Lombard (Collection Signé), 2008

     

     

     

     

     

    1858, Wyoming. Ambrosius Van Deer, un gros éleveur, a promis la somme faramineuse de 1000 dollars à qui lui ramènerait son neveu enlevé par les Sioux. Alléché, Jess Chisum tente un coup de bluff: faire passer son propre fils pour l'enfant tant recherché. Bien mal lui en prend: accusé de meurtre et amputé d'un bras, le jeune homme ne pourra plus compter que sur son habileté au colt pour que vive la légende du cow-boy manchot. La réédition attendue d'un des chefs-d'oeuvres du duo J. Van Hamme/G. Rosinski.

    Cet album est assorti des premières pages du scénario écrit par Jean Van Hamme.

    (présentation de l'éditeur)

     

    Avec un tel titre, on pense savoir à quoi s’en tenir et en effet, il s’agit bien d’un western dans la plus pure tradition. Un western avec des cow-boys, des propriétaires de ranchs, un shérif et des indiens, sauf que ces derniers, bien qu’omniprésents dans le récit, sont ici relégués au dernier rang de la scène. A l’époque, précisément en 1868, lorsque l’histoire commence, ils commencent d’ailleurs à être parqués dans des réserves, leur culture bientôt piétinée par les blancs.L’histoire s’articule autour de Nate, qui pose en couverture, un bras en moins, une montre au cou, tenant fermement un fusil. Les onze premières planches contiennent une forte concentration d’évènements, dramatiques à souhait : Nate, jeune garçon de quatorze ans, joue à l’indien, déguisé par son grand frère pour récupérer une prime, celle que Van Deer offre à qui retrouvera son neveu Edwin enlevé par les indiens quelques années plus tôt. Malheureusement, la prime ne sera pas touchée par le grand frère, tué lors de la transaction par l’homme de main qui accompagne Van Deer. Pour survivre, Nate tue les deux hommes, presque sous les yeux de Cathy, la fille de Van Deer. Et toute sa vie, il ne fera que déguiser sa réelle identité pour dissimuler ce double meurtre.Dès le départ, on est saisi par ce nœud tragique qui transforme Nate en « un hors-la-loi » qui doit se débrouiller complètement seul. Ce qu’il parvient à faire, non sans mal, pendant à peu près 10 ans. Puis le récit reprend lorsque Nate, lassé de cette vie d’errance, aspire à se sédentariser. En posant ses maigres affaires à Wichita, dans le Kansas, sa vie va changer du tout au tout…

    Plusieurs toiles en double page alternent avec les planches de l’album, ce qui donne une autre profondeur à l’histoire et aère le récit de sa lourdeur dramatique. Ces toiles sont des tableaux magnifiques et représentent un cimetière avec des hommes occupés à creuser des tombes, une forêt avec des trappeurs à l’affût de gibier, deux cow-boys observant au loin un camp d’indiens devant des roches reflétant le soleil, une rue d’une ville de far west enneigée et animée…

    Cette BD somptueuse, d’un grand classicisme, initialement parue en 2001, m’a un peu glacée à vrai dire. Il est vrai que l’histoire, fort bien menée, est terrible pour Nate, ce jeune blanc qui se démène pour survivre, ne cessant d’esquisser les pièges qu’on lui tend, jusqu’au dernier qui lui sera fatal. Le scénario de Van Hamme est maîtrisé de bout en bout, le parcours de Nate est minutieusement décrit jusqu’à la chute finale. Les dessins de Rosinski sont eux aussi complètement parfaits, remplis de détails qui explorent la vie de cette époque sans aucune fausse note.

    Une BD classique certes, efficace, passionnante à lire. L’adjectif qui me vient en tête est celui d’album implacable. La difficulté ici est de dénicher des défauts, en vain d’ailleurs, ce qui rend la critique difficile. J’ai bien aimé me plonger dans cette histoire mais une fois refermée cette BD m’a laissée de marbre sans que je puisse en expliquer la raison.

    Edité par le Lombard dans la collection Signé, ce beau livre a la particularité de dévoiler une partie du scénario que Van Hamme, en 1999, envoie à Rosinski. Cet ajout à la BD enrichit considérablement l’album car c’est l’occasion, assez rare, de comprendre tout le travail que demande un tel album. Il permet aussi de percevoir la complicité entre les deux auteurs.

    Marie-Florence Gaultier (chronique parue dans le blog 'Les 8 plumes' du magazine L'Express en mai 2014)

     
     

     lu en février 2017 (emprunt médiathèque de lecture publique Françoise Giroud, Labarthe sur Lèze)

    Tout est dit -et tellement bien dit- dans la chronique de Marie-France Gaultier : un grand plaisir de lecture.

     

     

     


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  • Roman

    Les délices de Tokyo / Durian Sukegawa

    traduit du japonais par Myriam Dartois-Akoet Isabelle Perrin.- Editions Albin Michel, 2016

     

     

     

     

     

     

     

    « Écouter la voix des haricots » : tel est le secret de Tokue, une vieille dame aux doigts mystérieusement déformés, pour réussir le an, la pâte de haricots rouges dont sont fourrés les dorayaki, des pâtisseries japonaises. Sentarô, qui a accepté d'embaucher Tokue dans son échoppe, voit sa clientèle doubler du jour au lendemain, conquise par ses talents de pâtissière. Mais la vieille dame cache un secret moins avouable et disparaît comme elle était apparue, laissant Sentarô interpréter à sa façon la leçon qu'elle lui a fait partager.

    Magnifiquement adapté à l'écran par la cinéaste Naomi Kawase, le roman de Durian Sukegawa est une ode à la cuisine et à la vie. Poignant, poétique, sensuel : un régal.

    (présentation de l'éditeur)

     

     lu en janvier 2017 (emprunt médiathèque de lecture publique Françoise Giroud, Labarthe sur Lèze)

    Le récit débute comme un conte qui va prendre le lecteur par la main pour l'emmener vers une forme de sagesse où l'on explore les raisons qui donnent un sens à l'existence, à travers des personnages malmenés par les événements, exclus de la société et cherchant, chacun à leur façon des raisons d'espérer, de rêver, d'aimer. L'un a connu l'univers carcéral et se rachète une conduite en tenant un commerce de restauration, l'autre à vécu plus de 50 ans dans un monde hermétiquement clos, mise au ban de la société pour une raison que l'on découvrira au fil du roman, la troisième est une adolescente perdue entre une mère prositutée et un père absent. Tous partagent une extrême sensibilité et une pudeur qui ne les empêchera pas de se rapprocher autour d'une fameuse pâtisserie japonaise.

    Alors on apprend à écouter la nature, le vent dans les arbres, à observer le léger mouvement des cerisiers en fleur, compagnons de solitude vers l'universelle condition humaine.

     

     

     


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  • Roman

    Un homme très recherché / John Le Carré

    Un homme très recherché

    traduit de l'anglais par Mimi et Isabelle Perrin.- Editions du Seuil, 2008 (titre original : A most wanted man

     

     

     

     

     

     

     

    Issa, jeune musulman russe affamé, arrive clandestinement à Hambourg en pleine nuit, avec autour du cou une bourse renfermant une somme substantielle d’argent liquide et les reliques d’un passé mystérieux. Annabel, jeune avocate idéaliste travaillant pour une association d’aide aux immigrés, se jure de sauver Issa de l’expulsion, au point de faire passer la survie de son client avant sa propre carrière. Tommy Brue, patron sexagénaire d’une banque anglaise en perdition sise à Hambourg, détient les clefs de l’héritage interlope du père d’Issa. Ces trois âmes innocentes forment un triangle amoureux désespéré, sur lequel vont fondre les espions de trois nations différentes, tous résolus à marquer des points pour leur camp dans la guerre avouée contre le terrorisme et la guerre inavouable entre leurs services respectifs. Peuplé de personnages inoubliables, Un homme très recherché fait la part belle à un humour caustique, tout en entretenant une tension croissante jusqu’à une scène finale poignante. Cette œuvre pleine d’une profonde humanité, ancrée dans les turbulences de notre époque où des forces en constante mutation se percutent partout dans le monde, révèle une vision d’ensemble réfléchie, sombre, impressionnante de logique et d’acuité.

    John le Carré est né en 1931. Après des études universitaires à Berne et Oxford, il enseigne à Eton, puis travaille pendant cinq ans pour le Foreign Office. Parmi ses derniers livres parus, La Constance du jardinier a connu un grand succès international et a été adapté à l'écran par Fernando Meirelles. Un homme très recherché est son vingt et unième roman. Il est commandeur de l’ordre des Arts et des Lettres. (présentation de l'éditeur)

     

     lu en décembre 2016 (emprunt médiathèque de lecture publique Françoise Giroud, Labarthe sur Lèze)

    Dans la lignée de "la Constance du jardinier", un roman qui mêlerait presque roman d'espionnage et comédie romantique. Un récit doux amer sur les questions que posent en Occident la peur du terrorisme islamiste et le sentiment de paranoia qui en découle après les nombreux attentats perpétrés par la nébuleuse djihadiste dans les capitales occidentales durant les décades 1990, 2000 et 2010 (Madrid, Londres, New-York, Paris...)

    Autour d'Issa, personnage principal en clair-obscur, orphelin perdu, russe par son père (il hérite de on père d'un placement financier douteux, le fameux compte Lipizzan, blanchisseuse d'argent 'sale'), tchétchène par sa mère, se raccrochant à la religion de sa mère pour y trouver une ligne de conduite après avoir été terriblement malmené voire torturé par de nombreux séjours en prison (il veut faire des études de médecine pour sauver ses "frères") Annabel et Tommy sont les pièces d'un jeu d'échecs dont ils ne maîtrisent rien -pas plus, semble-t-il que les Services secrets allemands. Et le jouet de l'arbitraire (et des influences souterraines et redoutables des Services secrets américains).

    Le dénouement est, comme souvent chez John Le Carré, brutal, dramatique, décrit dans une écriture composée de phrases sèches et abruptes, contrastant avec le soin méticuleux qu'il apporte à la mise en place de l'intrigue et la description de la psychologie de chaque personnage. Ceux-ci, qui deviennent familiers, semblent subir avec nous les foudres d'un démiurge qui laboure la scène en fin de partie.

     

     

     


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  • Roman

    Une année ches les Français / Fouad Laroui

    Editions Pocket, 2011 (initialement publié chez Julliard en 2010) 

     

     

     

     

     

     

     

    1969 : les Américains marchent sur la Lune. Mehdi, 10 ans, débarque au lycée Lyautey de Casablanca où son instituteur, impressionné par son intelligence et sa boulimie de lecture, lui a obtenu une bourse. Loin de son village de l’Atlas, Mehdi pense être un membre de l’équipage d’Apollo découvrant une planète inconnue : qui sont ces Français qui vivent dans le luxe, adorent les choses immangeables, parlent sans pudeur et lui manifestent un tel intérêt ? Durant une année scolaire animée par une galerie de personnages surprenants, l’histoire émouvante d’un enfant propulsé dans un univers aux antipodes de celui de sa famille. (présentation de l'éditeur)

     

     lu en novembre 2016 (collection personnelle)

    Mehdi Khatib, jeune garçon de 11 ans vivant à Béni Mellal dans l'atmosphère post-protéctorat, brillant écolier féru de lecture, soutenu par son enseignant, obtient une bourse afin de poursuivre ses études dans le prestigieux lycée français de Casablanca. Cet enfant vit à travers les romans classiques destinés à la jeunesse qu'il dévore. Ses modèles sont donc les personnages de la Comtesse de Ségur, et son expression orale est très influencée par le langage et les formules que l'écrivain emploie. Son immersion dans ce lycée où il va se trouver, interne de surcroît, va le plonger dans la découverte des autres : les Pieds-Noirs, la bourgeoisie marocaine, les Espagnols, les Français venus 'en coopération'. Le roman se déroule sur une année scolaire durant laquelle il va peu à peu trouver sa place, gagner l'estime du personnel du lycée. L'auteur réalise de beaux portraits des surveillants : Régnier l'anarchiste, Dumont le comédien cultivé, un peu dédaigneux... Tous développent une forme d'amitié pudique et virile avec le jeune écolier. Avec ses camarades, les liens sont plus difficiles à nouer. 

    La famille de l'enfant apparaît lointaine : le père semble avoir disparu sans que l'on ait vraiment expliqué à Mehdi ce qu'il était advenu. La vie familiale passée, le père admiré, soucieux de l'éducation de ses enfants : ces instants de onheur simple enfuis émaillent le récit. La mère, aimante, apparaîtra à la fin du roman, ainsi qu'un cousin qui prendra soin de lui, après quelques longs mois de solitude passés au lycée, éclairés par l'accueil dans la famille de son camarade Denis Berger.

    Le petit Mehdi, si attachant dans ses reflxions et sa candeur reste néanmoins une énigme : il comprend l'arabe, mais avec difficulté. Il semble partagé entre honte et fierté à propos de ses origines campagnardes. Au milieu du récit, alors qu'il feuillette un beau-livre présentant des reproductions de tableaux de Vincent VanGogh, il reste en arrêt devant les 'Vieux souliers' qui raniment un souvenir : son père offrant le gite à un clochard. Attablé dans la cuisine de Mme Berger, il reste pensif et son hôte se méprend sur les fameuses chaussures, creusant un abîme d'incompréhension qui va Une année chez les Françaisprofondémment blesser Mehdi.

     

     

     

     

    On perçoit la difficulté qu'éprouve l'enfant à vivre dans la culture 'européenne' dont il saisit avec brio les exigences (il achève son année 1er de sa classe) mais qui reste un monde très lointain pour sa famille. On devine qu'il sera un étudiant brillant (à l'image de l'auteur).

     

     

      

     

     


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  • Album (dès 4 ans)

    Tandem : album / texte de Séverine Vidal, dessins d'Irène Bonacina

    Tandem

    Genève : La joie de livre, 2015

     

     

     

     

    " L’amour est une affaire sérieuse lorsque l’on est un enfant… « Il avait dit midi. Et là, il est pire que midi. J’ai envie de le voir, et puis la seconde d’après : plus du tout. C’est comme ça. » La petite chouette dans sa robe à pois jaunes attend son ami, un drôle d’oiseau assis devant elle en classe et très bon en géographie. Ils sont inséparables, parlent beaucoup de tout, et de rien parfois aussi. Aujourd’hui, ils ont prévu un voyage, un tout petit voyage, de l’école à la rivière en vélo… Et il n’est toujours pas là. Un beau livre sur la force de l’amitié servi par les dessins tout en délicatesse, drôles et émouvants, à la Sempé, d’Irène Bonacina " (présentation de l'éditeur)

     

     lu en octobre 2016 (Ecole, classe de CE2 dans le cadre du Prix des Incorruptibles)

    Un bel équilibre entre texte et dessins : on se surprend à chercher page après page nos deux petits héros liés par une merveilleuse amitié : la chouette ébouriffée et l'étrange oiseau au bec jaune parmi les écoliers qui composent des scènes familières de la vie à l'école : jeux dans la cour... Irène Bonacina a pris le parti de n'utiliser que le noir et blanc à l'exception du jaune qui éclaire les dessins par petites touches.

     

     

      

     

     


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